Anne-Florence Salvetti
2 décembre 2025

« Plus personne ne peut me dire de partir » : les raisons de la naturalisation

Après quelques années d’expatriation, de nombreux Français de l’étranger font le choix de demander la nationalité de leur pays d’accueil. Quatre Françaises à la double nationalité nous racontent les raisons de leur choix.

« Une étape naturelle »

Fanny, Marie, Laurence et Johaina ont un point commun, elles ont pris la nationalité du pays dans lequel elles vivent respectivement depuis plusieurs années. Pour chacune, ce choix a découlé logiquement de leur parcours d’immigration. « Ça n’a jamais été une vraie question » estime Fanny, américaine depuis peu. « On s’était dit que si on restait sur du long terme, on demanderait la nationalité. Puis, une de nos filles est née aux États-Unis, et on voulait offrir la chance à nos deux aînées d’avoir aussi cette double nationalité. »

Derrière la logique, se cache également une praticité indéniable. « Nous sommes arrivés en Australie avec un PVT, puis nous avons obtenu un visa permanent. La dernière étape logique, pour sécuriser notre vie ici à long terme, c’était la citoyenneté. » explique Marie. Laurence parle, elle aussi, d’une « suite logique ». Dès qu’elle en a eu la possibilité, elle a déposé sa demande de citoyenneté. « Pour moi, c’était une étape naturelle après plusieurs années d’intégration et de vie au Canada. »

Car la naturalisation permet aussi de fluidifier le processus d’intégration dans le pays. « C’est normal de vouloir être intégrés de façon entière par la citoyenneté » explique Fanny. « Aujourd’hui, cela nous donne une légitimité à vivre et travailler aux États-Unis, comme les Américains nés ici. » Pour Johaina, comme pour beaucoup de Français en Grande-Bretagne, c’est le Brexit qui a précipité sa demande de nationalité. « Les règles d’immigration changent sans cesse, je vivais avec le stress de ne pas savoir si un jour je ne pourrais plus vivre et travailler ici. »

Tarifs, tests, réflexion personnelle : les hésitations

La motivation et la volonté ne suffisent malheureusement pas à obtenir une double nationalité. Pour ce faire, le parcours est parfois complexe. « Ce n’est pas une démarche simple » raconte Marie. « Il faut être sponsorisé par une entreprise, passer des tests, fournir énormément de documents administratifs, remonter dix ans d’historique de voyages à l’étranger, faire des eamens médicaux, passer un test d’anglais… et aussi payer des frais ! Pour notre famille, la procédure a coûté environ 15 000 dollars australiens en 2019. »

Le prix a également quelque peu refroidi Johaina. Mais ce n’est pas ce qui l’a fait hésiter à renoncer à ce projet. « Quand je révisais le test d’histoire britannique, cela m’a tellement fatigué de tout apprendre depuis le Moyen-Âge que j’ai songé à tout arrêter. » Mais pour le reste de la procédure, elle avait anticipé. « Je savais qu’ils demandaient l’historique des entrées et sorties du territoire sur les cinq dernières années, donc j’ai tout noté dans mon téléphone au fur et à mesure à chaque voyage. »

Pour Laurence, le plus grand défi de ce parcours s’est joué face à elle-même. « J’ai pris le temps de la réflexion personnelle, en me demandant si je me voyais vraiment faire ma vie ici, au point de devenir citoyenne canadienne. Ce questionnement m’a poussé à faire un vrai travail intérieur avant de franchir le pas. »

Une vie comme avant, la sécurité en plus

Avec leur nouveau passeport en poche, la vie de notre quatre Françaises n’a toutefois pas été drastiquement chamboulée. « Il n’y a pas eu de gros changement, mais je me sens plus légitime, dans un contexte politique et social un peu tendu. Le vrai plus c’est de pouvoir voter ici, notamment pour des décisions locales. » estime Fanny. Si Marie se sent toujours profondément Française, elle est fière d’avoir cette double nationalité. « Mais le passeport australien, c’est avant tout pour moi une formalité pratique, même si cela implique aussi des droits et des devoirs, comme voter, qui est obligatoire ici. Je suis reconnaissante d’avoir cette opportunité de vie. »

La fierté est également le sentiment qui prédomine chez Laurence. « La préparation à l’examen m’a permis d’en apprendre davantage sur l’histoire et les valeurs du Canada. Cette étape a transformé l’attente en un réel moment de fierté et d’ancrage. Je garde un souvenir très fort de ma cérémonie de citoyenneté, c’était solennel et très émouvant. Je suis fière d’être franco-canadienne. » Quant à Johaina, elle se sent désormais plus tranquille. « Je suis chez moi, plus personne ne peut me dire de partir. »

Et si un jour elles décidaient de repartir ? « Quoi qu’il arrive, cela restera une période de notre vie qui aura tellement compté, il n’y aura pas de regret à être citoyens américains. C’est une fierté pour nous, et une chance pour nos filles. » souligne Fanny.

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