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Tribune

En finir avec le fantasme de l’expatrié fiscal

Chaque année, l’image du Français de l’étranger revient dans le débat public, souvent
teintée de soupçons : on les imagine riches, fuyant le fisc, résidant dans des paradis
fiscaux, coupés de la réalité nationale.

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Français à l'étranger: et si on passait des « expats » à la diaspora?

Pourtant, cette vision est largement fausse. Les données disponibles, les parcours de ces expatriés et les ressorts de leur départ racontent une toute autre histoire : celle de millions de citoyens ancrés dans des réalités professionnelles, familiales ou éducatives, bien loin de l’évasion fiscale.

Des motivations d’expatriation très majoritairement professionnelles ou familiales

Les études réalisées sur les motivations des expatriés français sont sans appel.

Selon une enquête de l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE) et du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères de 2022 :

  • 62% des expatriés disent être partis pour des raisons professionnelles (poste à l’étranger, opportunité de carrière, mutation).
  • 21% évoquent des raisons familiales (conjoint étranger, regroupement familial, éducation des enfants).
  • 10% sont partis pour poursuivre leurs études
  • Et moins de 3% disent s’être installés à l’étranger pour des raisons fiscales.

Le mythe de l’« exilé fiscal » volontaire s’effondre face à cette réalité. En pratique, la fiscalité n’est qu’un critère marginal dans la décision de partir.

Quant à ceux qui partent effectivement pour des raisons fiscales, ils sont statistiquement marginaux. Les données de la DGFiP montrent que les redevables de l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) ayant quitté la France représentent moins de 0,2 % des assujettis.

Une fiscalité souvent maintenue avec la France

Par ailleurs l’idée selon laquelle les Français de l’étranger chercheraient à se soustraire à l’impôt repose sur une méconnaissance des règles fiscales internationales.

En réalité, de nombreux Français vivant à l’étranger continuent à être imposés en France, s’ils ont des biens immobiliers ou des revenus fonciers en France, s’ils perçoivent des revenus de source française ou s’ils gardent leur foyer fiscal en France (conjoint, enfants, centre des intérêts économiques).

Les conventions fiscales bilatérales signées par la France avec plus de 120 pays permettent d’éviter la double imposition, mais pas l’imposition tout court !

Par ailleurs, les Français résidant dans des pays comme les États-Unis, l’Allemagne ou le Canada, qui représentent la grande majorité des expatriés sont souvent davantage imposés sur le revenu qu’en France, compte tenu des niveaux de prélèvements locaux.

Quant aux résidents de pays à fiscalité réduite (Dubaï, Singapour, Suisse), ils ne représentent qu’une minorité. En 2023, moins de 5% des Français inscrits au registre vivaient dans des territoires classés à fiscalité avantageuse, selon les données du ministère.

Une contribution toujours active à la France

Loin d’avoir « tourné le dos à la France », les Français de l’étranger gardent une relation forte avec leur pays d’origine

Ils votent : près de 410 000 Français de l’étranger ont voté à la présidentielle de 2022, soit un taux de participation similaire à celui de certaines régions de France.

Ils investissent : beaucoup conservent un patrimoine immobilier en France.

Ils contribuent à l’image et à l’influence de la France à l’étranger, notamment dans les secteurs de l’entreprise, de la culture ou de l’enseignement.

Ils envoient des fonds vers la France ou soutiennent des proches, renforçant ainsi les liens économiques.

Ils scolarisent leurs enfants en francais : Les écoles françaises à l’étranger (AEFE) accueillent plus de 390 000 élèves, dont environ un tiers de nationalité française, témoignant d’un attachement durable à la langue et à la culture.

Une réalité économique qui tord le cou aux fantasmes

La figure du « grand patron expatrié pour raisons fiscales » masque des réalités bien plus modestes :

  • Un quart des expatriés français gagne moins de 30 000 € nets par an, selon une étude de la Banque Transatlantique (2021).
  • Beaucoup occupent des postes dans la coopération, l’enseignement, le commerce, les ONG ou les institutions internationales.
  • Dans de nombreuses destinations (Afrique, Asie, Amérique latine), les expatriés français ne bénéficient pas d’un système social plus généreux, au contraire.

Une représentation politique parfois caricaturale

Certains discours politiques ou médiatiques alimentent la confusion entre expatriation et optimisation fiscale. Or, cette stigmatisation nuit à l’image des Français de l’étranger, et parfois même à leurs droits.

En réalité les Français de l’étranger ne sont ni des privilégiés coupés du pays, ni des exilés fiscaux par principe. Ils sont des enseignants au Maroc, des ingénieurs en Allemagne, des entrepreneurs au Canada, des étudiants aux États-Unis, des retraités auprès de leurs petits-enfants. Ils sont la France, ailleurs.

Plutôt que de les suspecter, il serait plus juste et plus utile de renforcer les liens avec cette diaspora, d’améliorer les services consulaires, de reconnaître leur rôle dans la diplomatie économique et culturelle, et d’en finir avec les procès d’intention.

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