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Quelle stratégie pour gérer la crise sanitaire et économique en Corée du Sud ?

Invité lors d’un webinaire organisé par la Chambre Franco-Coréenne du Commerce et de l’Industrie ( FKCCI) le 9 avril, Chang Huh , le vice-ministre de l’économie a présenté la stratégie de la Corée du Sud pour endiguer l’épidémie du covid-19 tout en préservant son activité économique.

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De part sa proximité géographique et économique avec la Chine, la Corée était au mois de février le deuxième foyer de contamination. Le virus s’est alors très rapidement répandu notamment dans la région de la ville de Taegu, quatrième ville du pays, suite à de multiples contaminations au sein d’un groupe religieux. Face à cette propagation, les autorités coréennes ont mis en place une stratégie de gestion de crise sanitaire efficace appelée la politique des 3T-P. Lors du webinaire organisé la Chambre Franco-Coréenne du Commerce et de l’Industrie, le vice-ministre Chang Huh en a présenté les quatres principaux éléments : “Tester, Tracer, Traiter et Participer”. 

> La politique sud-coréenne des 3T-P pour gérer la situation sanitaire 

Tester : un dépistage massif 

Pour la phase de test, la Corée possédant une capacité de 20 000 tests par jour, a effectué un dépistage massif de la population. Le gouvernement coréen s’est hautement préparé notamment en terme d’équipements médicaux de masques et de kits de tests RT-PCR disponibles en moins de 6 semaines. Plus de 600 centres de tests ont été déployés ainsi qu’une cinquantaine de « drive-in consultations » permettant ainsi d’effectuer à ce jour plus de 460 000 tests. 

Tracer : mise en place d’enquêtes épidémiologiques

La phase de traçage consiste en premier lieu à des enquêtes épidémiologiques rigoureuses. Elle inclut également l’utilisation des images CCTV, des données de géolocalisation des téléphones mobiles et des relevés de cartes bancaires. L’utilisation de ces données personnelles s’est effectuée, selon Chang Huh, conformément à la loi coréenne relative à la protection des données qui est, selon lui, équivalente au Règlement Général pour la Protection des Données (RGPD) en Europe. 

Traiter : classement de la population en fonction des symptômes

Cette étape comprend d’abord une catégorisation des personnes contaminées en fonction de la gravité de leurs symptômes : légers, modérés, sévères et très sévères. Pour les patients atteints de symptômes légers, l’isolement à domicile est préconisé. Les personnes concernées doivent alors contacter les autorités tous les deux jours afin de vérifier que l’isolement est bien appliqué. Elles sont surveillées par télésurveillance, des packs nourriture et sanitaire contenant gels, masques et thermomètre leur sont déposés. Pour les autres patients, un centre de traitement leur est attribué selon la gravité de leurs symptômes. Les patients dits « ordinaires » ne souffrant pas de maladies respiratoires sont séparés des personnes contaminées par le covid-19 et sont soignés dans d’autres établissements.

Participer : la population mobilisée

Pour faire face à cette crise, le gouvernement coréen a pu compter sur la participation de sa population. Cette participation débute par le respect de l’isolement et des gestes barrières permettant de limiter la propagation du virus. Des médecins et infirmiers des secteurs public et privé ont également accepté de soigner bénévolement des patients. 

> La stratégie sud-coréenne pour faire face à l’impact économique de la crise

Grâce à sa politique sanitaire, la Corée du Sud n’a pas dû faire appel à un confinement généralisé.Néanmoins, la pandémie a eu des impacts sur l’économie dont les effets sont déjà visibles. Dans ce contexte, le ministre de l’économie a présenté lors de la conférence le plan de soutien économique à destination des ménages, des entreprises et des marchés financiers, de plus de 150 milliards de dollars, mis en place par le gouvernement.

Des mesures de relance économique :

Le premier objectif de la Corée du Sud a été de mettre en oeuvre une “sécurité nationale”, un plan de soutien pour aider les différents acteurs économiques à surmonter les dommages causés par la crise du covid-19 en mettant l’accent sur l’économie. Pour ce faire, plusieurs mesures ont été annoncées à différentes échelles. Un fonds d’urgence de 24 milliards d’euros a notamment été débloqué, dont une partie réservée à 70% de la population la plus pauvre, destinée à promouvoir la consommation générale. Grâce à ce fonds, des paiements de secours d’urgences seront effectués et des coupons de consommation seront mis à la disposition des citoyens.  La banque centrale va pour sa part soutenir l’apport de liquidité en émettant 100 trillions de won coréens.  

Les PME, premières bénéficiaires de la politique de relance économique

Le gouvernement sud-coréen souhaite aider les PME à faire face aux difficultés financières urgentes qu’elles peuvent rencontrer en mettant en place plusieurs mesures visant à réduire les coûts de ces entreprises. L’Etat va notamment instaurer des subventions de protection de l’emploi ou des réductions des assurances sociales et des factures d’électricité. Les entreprises fermées à cause du coronavirus bénéficieront d’une aide pour leur réouverture. 

En complément à la réduction de leurs coûts, ces entreprises profiteront d’aides financières. Des prêts à taux d’intérêts plus bas leurs seront accordés ainsi que des garanties spéciales et préférentielles. Leurs échéances et les périodes de remboursement des prêts seront quant à elles reportées.

Des aides financières pour les moyennes et grandes entreprises

Deux types de mesures sont établies : l’apport de liquidités et un soutien à l’exportation. Pour garantir les liquidités de l’industrie globale, l’Etat met à disposition de ces sociétés des obligations convertibles d’un total de 5 milliards d’euros qu’elles peuvent acquérir à des taux relativement bas pour augmenter leurs fonds propres. Parallèlement, un remboursement rapide des obligations de société à hauteur de 3,1 milliards d’euros va être effectué. Des prêts d’urgence seront attribués aux entreprises basés sur leur performance exportatrice. Ces mêmes sociétés bénéficieront aussi de garanties spéciales et d’aide pour le marketing à l’étranger. Les procédures douanières pour les matières premières et sous-matériaux seront elles accélérées. En outre, les entreprises pourront effectuer leurs paiements douaniers par versements et un remboursement anticipé des impôts leur sera octroyé. 

Un soutien monétaire pour le marché boursier et le marché des changes

Afin de soutenir le marché boursier, le gouvernement va faciliter sa régulation et établir un fonds de stabilisation des stocks. Le marché des changes sera aussi stabilisé de trois manières différentes. Premièrement, le ratio de couverture des besoins de liquidité passera de 80 à 70%. Le prélèvement sur les passifs en devises des établissements financiers hors dépôts jusqu’à présent fixé à 0,1% sera supprimé. Enfin, le plafond de la position des instruments dérivés de change de la banque passera de 40 à 50% pour les banques commerciales. 

Des aides pour les secteurs les plus impactés

Certains secteurs tels que le tourisme, le transport aérien ou le cinéma sont plus directement impactés par la crise économique. Pour leur permettre de surmonter les difficultés auxquelles ils sont confrontés, le gouvernement sud-coréen a mis en oeuvre différentes mesures de soutien. Pour l’aviation, un prêt d’urgence de type SCLB est déployé permettant d’assurer de la liquidité à ce secteur. Pour le cinéma, une subvention à la production cinématographique sera notamment accordée et une formation professionnelle aux cinéastes coréens sera offerte par le gouvernement. Quant au tourisme, les inspections hôtelières seront suspendues et les frais d’inspection de sécurité seront réduits. Aussi, une aide à la formation des employés des aéroports commerciaux sera fournie. 

> La solution dans la coopération ?

« La France a réalisé qu’elle avait à apprendre de la stratégie coréenne à la fois en terme de gestion de crise mais aussi pour se préparer à sortir de la situation de confinement dans laquelle nous nous trouvons » a fait remarquer l’ambassadeur français Philippe Lefort en rappelant que les présidents Moon Jae-in et Emmanuel Macron se sont entretenus le 13 mars dernier. Selon lui, la résolution de cette crises aux multiples aspects résiderait dans une coopération non seulement entre ces deux pays mais également mondiale. En effet, la Corée du Sud tire sa stratégie de son expérience de la crise du MERS ( Middle East Respiratory Syndrom ) de 2015. Depuis cette épidémie, la Corée du Sud a pu réviser et compléter son système médical et ainsi élaborer une nouvelle politique d’endiguement de la maladie. Selon l’ambassadeur français Philippe Lefort : “ C’est une stratégie qui semble être gagnante puisque la tendance est aujourd’hui à un endiguement de la maladie avec une moyenne de nouveaux cas quotidiens inférieure à 100 depuis près d’un mois.” Le pays se trouve dans une logique d’extinction du virus du moins dans sa partie interne avec une crainte potentielle de nouveaux cas de deuxième vague importée pour laquelle les autorités coréennes accordent une attention très importante. 

« Il ne s’agit pas pour nous de donner des leçons mais de partager un retour d’expérience qui pourra être utile à chaque pays en fonction de leur propre contexte, culture et histoire » a déclaré pour sa part David-Pierre Jalicon, le président de la FKCCI dans son intervention d’ouverture. Cependant, comparer la Corée du Sud et la France peut s’avérer pertinent. En effet, ces deux pays présentant une population quasi-équivalente ne gèrent pas la crise de la même manière. La Corée du Sud, grâce à sa politique de gestion de crises sanitaire, a su contrairement à la France éviter un confinement généralisé et ainsi protéger son activité économique dans une certaine mesure. La production industrielle en France est aujourd’hui réduite à 25% de sa capacité alors que ce chiffre représente celui de la partie impactée de la production coréenne. Néanmoins, la part du commerce extérieur de la Corée du Sud, 6ème puissance exportatrice mondiale, correspond à 70% du PNB ou PIB. Par conséquent, malgré le fait qu’elle ait su gérer la crise sanitaire sur son territoire,  la Corée du Sud sera tout de même impactée par la récession mondiale. 

Le séminaire en ligne réunissait plus de 400 personnes dont les intervenants David-Pierre Jalicon, Président de la FKCCI et PDG de DPJ & Partners Architecture, Philippe Lefort, ambassadeur de France en Corée du Sud, Chang Huh, vice-ministre coréen de l’économie et des finances en charge des affaires internationales, Sang-Hyun Chang, Président d’Invest Korea, Mathieu Elie, Vice-Président de la zone Asie Pacifique du groupe Guerbet et Secrétaire Général du Club Santé Corée, et Sébastien Faletti, journaliste, correspondant Asie de l’Est pour le Figaro.

 

 

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