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Interviews de l’été : Rencontre avec Warda Souihi

Les élections consulaires de mai dernier ont révélé une nouvelle génération d’élus aux origines et aux parcours singuliers. Durant tout l’été, nous vous proposons de découvrir ces nouveaux visages qui représentent la France et les Français à l’étranger. Aujourd’hui, rencontre avec Warda Souihi, conseillère consulaire à San Francisco.  

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Français à l’étranger : Quels sont les grands enjeux de votre circonscription et comment entendez-vous conduire votre action ?

Warda Souihi : La 8ème circonscription des États-Unis compte 11 États et territoires (Alaska, Hawaï, Guam, Oregon, Washington, Californie nord, Wyoming, Idaho, Nevada nord, Utah). Elle est, de loin, la circonscription la plus étendue des 9 circonscriptions que comptent les États-Unis. Sur un territoire aussi large, les enjeux sont tout autant diversifiés que territorialisés. Certaines entreprises françaises, par exemple, font face à des difficultés d’attractivité dans certains États et peinent à recruter malgré des compensations salariales attrayantes, quand d’autres se développent plus facilement profitant de l’essor économique important des régions de San Francisco et de Seattle par exemple, portées par l’industrie de la Tech notamment. Les conditions climatiques sont elles aussi différentes et l’on assiste malheureusement de plus en plus régulièrement à des feux de forêt en Californie, en Oregon, dans l’État de Washington, avec de épisodes de fumées et de dégradation de la qualité de l’air. La région peut également être soumise à certaines catastrophes naturelles comme le séisme en Alaska récemment.

Comment j’entends conduire mon action : J’ai travaillé de nombreuses années dans la Fonction Publique Territoriale et d’État et les nombreuses missions que j’ai accomplies ont toutes eu un fil conducteur : rendre accessible le service public à tous et améliorer la qualité du service public. Aujourd’hui, outre-Atlantique et en tant qu’élue, je prolonge mon action dans l’intérêt général. Je me suis engagée à être accessible et disponible pour ma communauté (courriels, téléphone, réseaux sociaux, newsletter, etc.), et surtout à aller à la rencontre des habitants des 11 États et territoires de la circonscription. Je souhaite être une élue qui reste connectée aux réalités du terrain et qui apporte des solutions. Pour ce faire, je travaille bien entendu en lien étroit avec le Consulat Général de France à San Francisco, avec l’Administration française, les sénateurs représentant les Français hors de France et le député de notre circonscription. J’essaie de construire une relation partenariale et collaborative dans laquelle je suis un appui et un soutien pour toutes les parties prenantes. Je suis en faveur du « travailler ensemble » plutôt que « travailler contre ». Je pense que toutes les bonnes volontés et les bonnes idées sont à étudier.

FAE : Selon vous, quels seront le cadre et les limites de votre champ d’action ?

W.S : Les prérogatives du Conseiller des Français de l’étranger sont définies par le cadre législatif (loi n°2013-659 du 22 juillet 2013 relative à la représentation des Français établis hors de France). Les conseillers peuvent ainsi être consultés sur toute question concernant les Français établis dans la circonscription et relative à la protection sociale et à l’action sociale, à l’emploi, à la formation professionnelle et à l’apprentissage, à ‘enseignement français à l’étranger et à la sécurité, etc. Le conseiller élu a également un rôle consultatif et est chargé de formuler des avis sur les questions consulaires ou d’intérêt général, notamment culturel, éducatif, économique et social, au sein du conseil consulaire. Le Conseiller des Français de l’étranger est un véritable relai local entre les Français vivant à l’étranger et l’Administration française et les élus représentants les Français établis hors de France (sénateurs et députés). L’existence du Conseiller des Français de l’étranger est encore récente puisque nous assistons seulement à la deuxième élection après celle de 2014 avec, malheureusement, un taux d’abstention très élevé.

De mon point de vue, son rôle devrait être davantage renforcé auprès des instances administratives nationales et de l’Assemblée des Français de l’Étranger. Je pense que les 442 Conseillers des Français de l’Étranger élus devraient pouvoir mutualiser leurs connaissances et leurs retours d’expérience et disposer d’une véritable institution comme l’Association des Maires deFrance en est une par exemple. Cela permettrait de constituer et d’organiser des groupes de réflexion et des commissions de travail thématiques. Les Conseillers travaillent souvent seuls ou par groupes de 2-3 (selon le nombre de sièges gagnés aux élections). Bien souvent, les conseillers font face à des problèmes et des problématiques similaires et travailler conjointement rendrait notre action plus efficace et efficiente sur le terrain.
On a souvent tendance à comparer le rôle du Conseiller avec celui d’un élu local en France. Cependant, ayant moi-même été élue locale en France, je suis en mesure de juger des limites de cette comparaison. Les moyens mis à disposition du Conseiller des Français de l’étranger sont plus restreints que n’importe quel élu de France, ce qui réduit largement son champ d’action. Le Conseiller exerce ses missions de façon totalement bénévole et ne dispose pas de ressources humaines ou matérielles comme celles dont un élu local disposerait par exemple.

Pour autant, à titre personnel, je pense que c’est à l’élu de décider de ce qu’il souhaite faire de son mandat en définissant les contours de son champ d’action. J’ai choisi d’être dans l’action pour ma part. À titre d’exemple, je me suis engagée à me rendre dans les 11 États et territoires de la circonscription pour rencontrer les habitants français en finançant personnellement les frais de déplacements. Toutefois j’ai bien conscience que cela représente un sacrifice financier personnel qui devrait, selon moi, être couvert par des indemnités de déplacement dans le cadre de mes missions. Comment être un relai local lorsque l’on ne peut pas se déplacer dans la circonscription ? Cela étant dit, cela ne m’empêche pas de mener à bien la mission qui m’a été confiée. De mon point de vue, on devient l’élu que l’on souhaite devenir.

FAE : Pourquoi avez-vous souhaité vous impliquer dans ces responsabilités consulaires ?

W.S : J’ai pris conscience très jeune de l’intérêt de m’investir, d’aider et de représenter les personnes autour de moi. Cela s’est fait naturellement. Mon engagement auprès des Français a démarré lorsque j’avais 11 ans et que j’ai été élue pour la première fois au suffrage universel direct au Conseil Municipal des Jeunes. J’ai ensuite été réélue une seconde fois et, 11 ans plus tard, à l’âge de 22 ans, j’ai été élue Conseillère Municipale Déléguée au sein de cette même commune, où j’ai grandi, devenant l’une des plus jeunes élues de France. De plus, dès l’âge de 11 ans et jusqu’à la fin de mes études supérieures, j’ai toujours été élue Déléguée de classe (j’ai parfois été élue sans même voir été candidate !) dans l’unique but d’aider et de représenter les intérêts de tous.

J’ai ensuite décidé de m’investir pleinement au cœur du service public en devenant Fonctionnaire d’État, ce qui m’a permis de mettre à profit mes expériences et d’avoir une connaissance parfaite des enjeux de l’Administration française.

Mon implication en tant que Conseillère des Français de l’Étranger n’est donc que le prolongement naturel de mon engagement depuis plus de 20 ans qui repose sur la représentation et la défense des intérêts de tous.

FAE : Avez-vous rencontré des difficultés d’intégration dans votre pays d’accueil et quels sont vos liens avec la communauté française présente ?

W.S : Je n’ai pas eu de véritable difficulté d’intégration dans mon pays d’accueil, les États-Unis. Ce pays est riche d’une histoire culturelle et, à Seattle, dans l’État de Washington où je vis, la communauté est cosmopolite, dynamique et très accueillante.

La communauté française a été mon premier point de contact lorsque je préparais mon arrivée à Seattle et a fait preuve d’une entraide et de conseils précieux. Il y a véritablement une solidarité et une générosité de la communauté française qui est extraordinaire. Le tissu associatif français y est également très développé et pas un mois ne passe sans qu’un évènement culturel français ou une rencontre n’aient lieu.

FAE : Aviez-vous précédemment un lien particulier, par exemple familial, avec le pays dans lequel vous avez été élu ?

W.S : Je n’avais pas de lien particulier avec les États-Unis auparavant, mais, un séjour dans le cadre de mes études scolaires plus jeune m’avait convaincu de revenir un jour aux États-Unis.

FAE : Avez-vous connu d’autres expériences d’expatriation ?

W.S : J’ai vécu des expériences d’expatriation à travers mes proches, à commencer par mes grands-parents et mes parents qui ont quitté leur pays de naissance durant la guerre. Ces parcours d’expatriations ont forgé des valeurs importantes dans ma vie et sont des exemples pour moi d’une expatriation réussie.

Je pense sincèrement que, s’expatrier, c’est être bien chez soi où que l’on soit sur la planète.

FAE : Quel est votre parcours professionnel ?

W.S : Diplômée en Grande École de Commerce en France et actuellement en Exécutive MBA à l’Université de Washington, j’ai un double parcours privé-public de plus de 13 ans. Consultante en réorganisation et en restructuration pour l’entreprise Thales, j’ai accompagné des entreprises dans leur développement, leur création et parfois malheureusement, lors de restructurations de sites.

J’ai, par la suite, décidé de rejoindre la Fonction Publique (Territoriale puis d’État) afin de me consacrer pleinement au service public, pour y apporter mon expertise et contribuer à l’amélioration du service public. Je pense réellement que l’on choisit de rejoindre l’Administration publique par vocation, par l’envie d’aider et d’accompagner les administrés.

Dans le cadre de mes missions professionnelles, j’ai toujours souhaité être un interlocuteur accessible et disponible en restant un contact direct avec les citoyens français. Je me suis réellement épanouie en me nourrissant des échanges constructifs avec les citoyens. Prendre le temps de recevoir, d’écouter, et de comprendre une personne qui est confrontée à une difficulté est pour moi essentiel. Il n’y a rien de plus gratifiant que de voir repartir avec le sourire une personne qui était en colère ou en pleurs. La qualité du service public est de mon point de vue primordiale et est d’ailleurs l’un des engagements retenus par le ministère de la Transformation et de la Fonction Publique.

J’ai ainsi occupé diverses fonctions dans la Fonction Publique Territoriale en tant que Directrice de l’Emploi, la Formation, Enseignement Supérieur, Politique de la Ville et Économie Sociale et Solidaire dans une grande Métropole en région parisienne. J’ai ensuite intégré la Fonction Publique d’État au ministère de l’Intérieur et ai été en charge des questions de Qualité, Fraude, Performance et d’Efficience.

FAE : Disposez-vous de la double nationalité ? Ce statut vous semble-t-il présenter un quelconque avantage ?

W.S : Je ne dispose pas de la double nationalité mais ma réflexion va au-delà de la nationalité que l’on acquiert. Je pense que le plus important c’est la richesse de la culture du pays dont on s’imprègne et l’apport de notre culture française dans le pays d’accueil, ce que l’on construit également avec les habitants. Pour moi, la notion du « Vivre Ensemble » est essentielle.

FAE :  Si vous ne deviez retenir qu’un souvenir heureux… et un autre malheureux de votre vie à l’étranger, quels seraient-ils ?

W.S : Des souvenirs heureux, il y en a beaucoup mais si je devais n’en choisir qu’un, ce serait sans l’ombre d’un doute la confiance que les Français m’ont accordée lors de mon élection en tant que Conseillère des Français de l’étranger. Je n’oublierai pas la date du 30 mai 2021, jour d’annonce officielle des résultats ainsi que les nombreux messages de soutien que j’ai reçus. Quant au souvenir malheureux, je pense bien évidemment au Covid-19 et aux conséquences dramatiques que la crise sanitaire a engendrées, mais aussi l’impossibilité pour nous, Français vivant aux États-Unis, de nous rendre en France pour visiter, retrouver nos proches. Dans la continuité de la libre-circulation, et j’aimerais que cela ne devienne rapidement qu’un mauvais souvenir, le « Travel Ban » qui est encore en application, ne permet pas encore à tous les Français de circuler librement entre les États-Unis et la France. Je suis très touchée par ce sujet parce que je l’ai vécu moi-même et parce que je reçois des messages de nos concitoyens Français qui n’ont pas pu se rendre au chevet d’un de leurs proches ou d’autres qui n’ont pas pu voir leur petits-enfants après presque 18 mois de « Travel Ban ». C’est un sujet prioritaire pour moi et j’espère que la situation évoluera rapidement.

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